Le blogue de la Semaine de sensibilisation aux maladies mentales : des histoires du rétablissement, des expériences personnelles et des nouvelles concernant la santé mentale/ maladie mentale.

Friday, May 30, 2014

Le système de justice pénale; le plus grand prestataire de soins de santé mentale au pays

La loi touche presque tous les aspects de notre vie. Nous avons des lois qui réglementent les activités courantes, telles que conduire une voiture et louer un appartement et des lois qui s’appliquent aux crimes, tels que le vol et d’autres menaces et défis pour la société. Le système de justice pénale représente toutes les interactions possibles entre le système de justice et les policiers, les salles d’audience et les prisons, jusqu’aux programmes de réhabilitation gérés par l’État, les services de probation et les maisons de transitions. L’impact économique du système de justice pénale au Canada représente un coût moyen de 259,05 $ par jour pour l’incarcération d’un détenu dans un pénitencier fédéral. Si on considère que la peine d’emprisonnement dans un pénitencier fédéral est d’un minimum de deux ans, chaque détenu coûte aux contribuables canadiens 189 106,50 par année. L’objectif du système de justice pénale devrait toujours être axé sur la réhabilitation et la réintégration à la vie normale après la détention.

Cependant, le nombre de personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale qui se retrouvent dans le système de justice pénale augmente et la prédominance de la maladie mentale dans les prisons est sensiblement plus élevée que dans le reste de la population. Les prisons et les pénitenciers du Canada deviennent rapidement les plus grands prestataires de soins de santé mentale au pays.


Les soins de santé mentale sont insuffisants dans les prisons et les centres de détentions canadiens, et de nombreux détenus ayant des problèmes de santé mentale sont mis en isolement correctionnel pour leur protection, en raison de leur incapacité de s’adapter aux cadres carcéraux réguliers. Les personnes qui sont libérées des établissements correctionnels et qui indiquent qu’elles sont victimes de préjugés en raison de leur implication avec la justice de justice pénale, sont souvent « négligées » ou « rejetées » par les services communautaires en santé mentale. Prenons le cas de Trevor comme exemple.

 Trevor a fréquenté les prisons depuis son adolescence et il a maintenant 35 ans. Il a été diagnostiqué comme souffrant de troubles du spectre de l’alcoolisation fœtale (TSAF), de schizophrénie, et de troubles de personnalité antisociale. Il a également subi une blessure au cerveau. Bien qu’il habite dans une maison de transition, son professionnel de la santé mentale a aidé Trevor à décrocher un emploi par l’intermédiaire des services d’aide à l’emploi pour les personnes atteintes de maladie mentale. Trevor a pu établir une routine quotidienne personnelle qui incluait d’aller marcher, de lire et de faire sa propre cuisine. Le professionnel de la santé mentale a aidé Trevor à mieux comprendre la maladie mentale et il lui a enseigné des stratégies d’adaptation pour répondre aux exigences quotidiennes en dehors du cadre carcéral.

Avec les données scientifiques disponibles démontrant l’efficacité des services pour les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale, et l’amélioration de la santé mentale réduisant ainsi les chances d’être impliqué dans le système de justice de justice pénale, « la question n’est pas à savoir si un traitement efficace existe, mais s’il est systématiquement disponible pour les personnes qui en ont besoin et si ces personnes souhaitent ou non bénéficier d’un traitement ». Lorsque les services sont disponibles et que le détenu a accès à ces services, le retour à la vie normale en dehors du cadre carcéral est possible. Un investissement fédéral est nécessaire afin d’assurer que les personnes vulnérables ne soient dépourvues des services en santé mentale dont elles ont besoin.



Obtenu après de l’Association canadienne des ergothérapeutes. Pour de plus amples renseignements, visitez le www.caot.ca

Friday, February 14, 2014

Le traitement pour les problèmes de santé/maladie mentale est plus qu’un médicament


Vérité numéro 1
L’accès équitable aux services de psychologie dans l’ensemble du Canada pour les personnes souffrant de problèmes de santé mentale et de maladies mentales n’existe pas! La disponibilité des différents types de traitements varie grandement d’un endroit à l’autre.

Vérité numéro 2
Les services de psychologie ne sont pas financés par les régimes provinciaux d’assurance‑maladie, ce qui les rend inaccessibles aux Canadiens à revenus modestes ou à ceux qui n’ont pas d’assurances. Ceci, malgré le fait que certains des traitements les plus efficaces pour les troubles mentaux communs sont d’ordre psychologique, comme la thérapie cognitivo-comportementale.

Les médicaments antipsychotiques ont prouvé être essentiels pour soulager les symptômes psychotiques de schizophrénie et les psychoses (hallucinations et délires). Toutefois, ils ne soulagent pas toujours les symptômes comportementaux de la maladie. Beaucoup éprouvent une très grande difficulté à communiquer, à se motiver, à s’occuper d’eux même et à établir et maintenir des relations avec les autres. En outre, en raison que les patients atteints de schizophrénie tombent souvent malade à l’étape la plus importante de leur vie pour développer une carrière (de 18 à 35 ans), ils sont moins susceptibles de suivre la formation requise pour occuper des emplois spécialisés. Par conséquent, beaucoup de personnes atteintes de schizophrénie éprouvent des difficultés, non seulement au niveau de leurs pensées et de leurs émotions, mais elles n’ont aucune compétence sociale et professionnelle et n’ont acquis aucune expérience.

Ce sont pour ces problèmes psychologiques, sociaux et professionnels que les traitements psychologiques et psychosociaux peuvent faire la plus grande différence. Il existe de nombreuses formes de thérapie psychosociale pour les personnes atteintes de schizophrénie et la plupart visent à améliorer le comportement social du patient — que ce soit dans un hôpital, dans la collectivité, à la maison ou au travail. Voici quelques-unes de ces approches.

Réhabilitation. Ceci comprend un vaste éventail d’interventions non médicales pour les personnes atteintes de schizophrénie. Les programmes de réhabilitation sont axés sur la formation sociale et professionnelle afin d’aider les patients actuels et les anciens patients à surmonter leurs difficultés dans ces domaines. Les programmes peuvent inclure l’orientation professionnelle, la formation à l’emploi, la résolution de problèmes et les compétences de base en gestion de l’argent, l’utilisation des transports publics et l’apprentissage social. Ces approches sont importantes à la réussite du traitement de la schizophrénie qui est axé sur la collectivité en raison qu’elles procurent aux patients les compétences nécessaires pour mener une vie productive à l’extérieur de l’univers confiné d’un hôpital psychiatrique.

Psychothérapie individuelle. Cette thérapie implique que le patient doit avoir des entretiens réguliers avec un professionnel de la santé mentale, comme un psychiatre, un psychologue, un travailleur social en psychiatrie ou une infirmière. Les séances peuvent porter sur des problèmes actuels ou antérieurs, des expériences, des pensées, des émotions ou des relations. En partageant leurs expériences avec une personne formée et emphatique — en parlant de leur univers avec une personne de l’extérieur —, les personnes atteintes de schizophrénie ou de psychose peuvent arriver à mieux se comprendre eux-même et à mieux comprendre leurs problèmes. Elles peuvent également apprendre à différencier ce qui est réel de ce qui n’est pas réel et déformé.

Des études récentes ont indiqué que la psychothérapie individuelle de soutien, orientée sur la réalité et les approches cognitivo-comportementales qui enseignent des techniques d’adaptation et de résolution de problèmes peuvent être bénéfiques pour les patients en consultation externe atteints de schizophrénie. Cependant, la psychothérapie n’est pas un substitue pour un médicament antipsychotique, mais elle est particulièrement efficace lorsque le médicament a d’abord soulagé les symptômes psychotiques du patient.

La « psychopédagogie » en famille consiste à enseigner diverses stratégies d’adaptation et des aptitudes de résolution de problèmes; elle peut également aider les familles à mieux venir en aide à leurs proches en difficulté et contribuer à obtenir des meilleurs résultats pour le patient.
Très souvent, les patients atteints de schizophrénie obtiennent leur congé de l’hôpital et retournent dans leurs foyers; il est donc important que les membres de la famille en apprennent le plus possible sur la schizophrénie et qu’ils comprennent les difficultés et les problèmes liés à cette maladie. Il est également utile que les membres de la famille envisagent des façons de réduire au minimum les chances de rechute du patient — par exemple, en utilisant différentes stratégies sur l’adhésion au traitement — et en connaissant les différents services disponibles pour les patients en consultation externe et leurs familles au cours de la période suivant l’hospitalisation.

(Adapté de « Psychosocial Treatments for Schizophrenia » de la NATIONAL INSTITUTE OF MENTAL HEALTH)



Wednesday, January 29, 2014

La nouvelle présidente de la campagne de l'ACMMSM pour 2014

En tant que coprésidents de l'Alliance canadienne pour la maladie mentale et la santé mentale (ACMMSM), nous avons l'immense plaisir de vous présenter la nouvelle présidente de la campagne de l'ACMMSM pour 2014 : Florence Budden! Florence s'est engagée avec enthousiasme dans ce rôle, ce qui aura sûrement un effet positif dans les campagnes de cette année et, sans aucun doute, inspirera un plus grand nombre de Canadiens à se joindre à la conversation.


Dave Gallson et John Higenbottam, coprésidents de l'ACMMSM.


Bonjour, mon nom est Florence Budden et je suis infirmière en soins psychiatriques, de Terre-Neuve et Labrador. C'est avec plaisir que je me présente devant vous aujourd'hui en tant que présidente de la campagne de 2014 pour l'ACMMSM. J'ai commencé ma carrière infirmière à T.-N.-L. à l'hôpital Waterford en 1988 après avoir terminé mes études à la Memorial University School of Nursing. En 1998, j'ai commencé à enseigner au Centre for Nursing Studies où je donnais une formation sur les soins cliniques en santé mentale aux étudiants en technique infirmière et en soins infirmiers, de même que d'autres formations sur la promotion de la santé et sur les soins aux aînés. Je détiens un certificat de l'Association des infirmières et infirmiers du Canada en santé mentale et soins psychiatriques. En septembre 2012, l'Association des infirmières et infirmiers du Canada a fait valoir mes compétences dans le domaine de la santé mentale.

J'ai fait du bénévolat toute ma vie. En 1999, j'ai œuvré auprès de la Schizophrenia Society of NL (SSNL) (Société de schizophrénie de Terre-Neuve et Labrador). Depuis, j'ai occupé divers postes au sein de la SSNL et de la Société de schizophrénie du Canada (SSC). Entre autres, j'ai été vice-présidente de la SSNL (2002-2004), présidente de la SSNL (2004-2011), présidente du comité de défense des droits de la SSC (2003-2009) pour n'en nommer que quelques-uns. Je suis la présidente actuelle de la SSC, de même que membre du conseil de la Fondation de la Société canadienne de schizophrénie.

J'ai représenté la SSC avec l'Alliance canadienne pour la maladie mentale et la santé mentale (ACMMSM) depuis 2011. Je participe aux activités du Comité des affaires publiques de l'ACMMSM. En 2013, j'ai siégé au comité de sélection pour la campagne de sensibilisation sur les Visages de la maladie mentale.

Ce lien avec le travail de bénévolat est en résumé la raison pour laquelle je désire me joindre à l'ACMMSM à titre de la nouvelle présidente de la campagne pour 2014. Je crois fermement que les vies peuvent être changées, que le rétablissement est possible et que le système de santé mentale au Canada peut être amélioré, mais seulement si nous travaillons ensemble en tant que pays pour y arriver. Tout au long de ma vie, j'ai toujours cru que je devais agir personnellement pour changer les choses que je voulais voir changer dans le monde.

La campagne des champions de la santé mentale rend hommage aux Canadiens qui ont fait des contributions remarquables dans le domaine de la santé mentale au Canada. Grâce à cette campagne, l'ACMMSM contribue à poursuivre la conversation au sujet de la maladie mentale dans toutes les régions. Je crois que ce rôle me convient tout à fait, car tous ceux qui me connaissent bien savent à quel point j'aime parler!!! Nous devons poursuivre le débat public sur la santé mentale et la maladie mentale en vue de réduire la stigmatisation et d'améliorer l'accès aux services de santé mentale. Cette campagne permet de créer un réseau de défenseurs inspirants pour la cause de la santé mentale et souligne l'approche « tout est possible » des Canadiens.

Grâce à la campagne des Visages de la maladie mentale et les activités de la Semaine de sensibilisation aux maladies mentales (SSMM), nous poursuivrons la conversation sur la maladie mentale et la santé mentale en présentant aux Canadiens cinq personnes inspirantes qui représentent des exemples positifs du rétablissement de la maladie mentale et qui partagent leurs histoires pour aider les autres dans leur cheminement vers le rétablissement, et pour créer un environnement, partout au Canada, qui facilite le rétablissement de la maladie mentale.

Je suis très enthousiaste à l'idée de participer aux campagnes de cette année et d'aider à faire avancer la cause de la santé mentale en tant que présidente de la campagne pour 2014. 

Friday, December 6, 2013

Blogue des membres: l’Association des psychiatres du Canada



Alors que nous approchons la période des fêtes, le moment est propice pour réfléchir à ce que l’année 2013 a été pour nous. Ce fut une année de changements et de défis que l’Association des psychiatres du Canada (APC) a su relever de plain-pied, seule et avec nos partenaires.

Nos efforts de plaidoyer ont été mis à profit, puisque nous avons accueilli Glenn Brimacombe en tant que nouveau chef de la direction de l’Association en août dernier.

Fondée en 1951, l’APC est le porte-parole national pour les psychiatres du Canada. L’Association est une organisation médicale très respectée et active qui s’engage à servir les besoins de ses membres et améliorer la santé globale de la population. C’est la première autorité nationale en matière de psychiatrie au Canada.

À un niveau national, l’APC a préconisé l’adoption de normes nationales relatives à la santé mentale pour notre système de santé et un financement équitable et consacré à la santé mentale. Elle a également été la première à lancer un appel en faveur de mesures à prendre pour réduire la stigmatisation liée à la maladie mentale. L’APC représente la profession de la psychiatrie auprès des gouvernements, du public, des universités, des associations médicales, des organismes de certification et d’homologation et autres organismes de soins de santé.

Certains de nos « dossiers chauds » en 2013 traitaient des prescriptions hors indication, de la maladie mentale parmi les membres des Forces armées canadiennes et les anciens combattants, de la prévention du suicide et du projet de loi C-14, Loi sur la réforme de la non-responsabilité criminelle (connu autrefois comme étant le projet de loi C-54)

Nous travaillons souvent en collaboration avec d’autres pour faire avancer la cause de la santé mentale. À cet effet, l’APC est fière de figurer parmi les membres fondateurs de l’Alliance canadienne sur la maladie mentale et la santé mentale (ACMMSM), qui rassemble les organismes divers partageant la vision commune d’un pays où la santé mentale des Canadiens est une priorité, et ceux qui souffrent d’une maladie mentale sont traités avec respect, reçoivent l’appui dont ils ont besoin et peuvent accéder aux soins.

L’année dernière, l’APC et d’autres organismes partenaires en santé mentale ont appuyé l’adoption du projet de loi C-300, lequel exige que le gouvernement établisse un cadre fédéral de prévention du suicide. À l’heure actuelle, l’Agence de la santé publique du Canada est en consultation avec les intervenants à l’échelle nationale, notamment l’APC, au sujet de ce que devrait prévoir le cadre.

L’APC fait aussi partie d’un groupe de collaboration national dans la prévention du suicide avec la Commission de la santé mentale du Canada (CSMC) et l’Association canadienne pour la prévention du suicide, chargée d’accroître la capacité en ce qui a trait à la prévention du suicide, de favoriser l’échange de connaissances et d’éclairer les politiques publiques.

La collaboration nous a également aidés à mieux faire entendre notre point de vue sur le projet de loi
C-54, maintenant le projet de loi C-14. Nous faisons partie d’une coalition composée de 12 organismes de santé mentale qui continue d’exprimer ses préoccupations au sujet du projet de loi.

Au cours de la dernière année, l’APC a instauré une section de militaires et d’anciens combattants, rassemblant les chercheurs et les cliniciens qui travaillent auprès des militaires, des anciens combattants et leurs familles afin de collaborer et de favoriser les soins et la recherche fondés sur des données probantes.

La lutte contre la stigmatisation et la discrimination est également un aspect important du plaidoyer et l’APC continue d’apporter son appui à la Semaine de sensibilisation aux maladies mentales. La Semaine a été fondée par l’APC et est maintenant administrée par l’ACMMSM.

L’APC favorise la recherche et la formation continue parmi ses membres en établissant et en respectant des normes de pratique et en favorisant le maintien des compétences dans la pratique de la psychiatrie générale et spécialisée. Elle travaille de concert avec le Collège royal des médecins et chirurgiens du Canada, la CSMC et le Collège des médecins de famille du Canada afin de déterminer les compétences de base en matière de santé mentale pour les médecins de famille et les spécialistes.

Nous nous attendons à ce que l’année 2014 soit toute aussi prometteuse alors que nous nous mobilisons pour faire avancer la cause de la santé mentale au Canada. Joyeuses fêtes à tous.


Thursday, November 21, 2013

Face-à-face avec Arthur Gallant


Je crois fermement que tout le monde vivant sur cette planète a une mission; nous avons tous un appel ou une vocation. Je ne fais pas exception. Je n’oublierai jamais quand ma grand-mère s’est assise avec moi à l’âge de quatre ans et m’a dit « Arthur, quand tu seras grand, tu deviendras quelqu’un un jour ». En grandissant, j’ai souvent réfléchi à ce qu’elle pouvait bien vouloir dire. J’ai posé la question à d’autres membres et amis de la famille. Qu’est-ce que ma grand‑mère a bien pu voir en moi à l’âge de quatre ans qui a pu lui faire croire que j’étais tellement spécial? Qu’est-ce qui la rendait tellement certaine que je ferais quelque chose de positif de ma vie quand je serais grand?

Ma vie a comporté, sans aucun doute, des défis particuliers; j’ai eu un cheminement tel que même le plus talentueux des écrivains n’aurait pas pu imaginer une telle histoire. Tout a commencé lorsque je suis né d’une mère qui souffrait d’un handicap intellectuel; mon père nous a laissé avant ma naissance et ma grand-mère a décidé de soutenir ma mère et de s’occuper de moi. Lorsque j’ai eu cinq ans, ma grand-mère est tombée malade et a été diagnostiquée plus tard avec la maladie d’Alzheimer. Ma mère a été forcée de s’occuper de moi à temps plein ou devrais-je plutôt dire que j’ai été forcé de m’occuper d’elle?

Avec cette lourde responsabilité sur les épaules, je ne me sentais pas comme les autres enfants de mon âge. J’ai passé toute mon enfance à m’inquiéter de ne jamais avoir assez d’argent et à me demander si la déclaration de revenus de ma mère était remplie à temps. La responsabilité a fini par devenir une charge trop lourde pour moi et je me rappelle que dès l’âge de huit ans, je me sentais tellement anxieux et déprimé que j’ai commencé à vomir, seulement pour ne pas avoir à aller à l’école.

Lorsque j’ai eu neuf ans, la Société d’aide à l’enfance m’a pris en charge et un juge a accordé la tutelle à la SAE, ce qui veut dire que la Société est devenue mon tuteur légal. Au cours des prochaines années, mes symptômes étaient toujours présents et je me suis bien vite demandé pourquoi je me sentais ainsi. Pourquoi était-ce si difficile pour moi de sortir du lit le matin? Pourquoi avais-je toujours le goût de pleurer sans vraiment savoir pourquoi? Pourquoi avais-je toujours l’impression que je serais kidnappé lorsque mon regard croisait quelqu’un dans le métro?

Après avoir reçu un diagnostic de dépression et de trouble d’anxiété, j’ai repris beaucoup d’énergie. Même lorsque j’étais adolescent, j’exprimais mon opinion au sujet des soins et du traitement que je recevais et j’estimais que mon équipe de soins de santé et mes aidants ne connaissaient pas toujours ce qu’il y avait de mieux. Le Bureau de l’intervenant provincial en faveur des enfants et des jeunes de l’Ontario m’a aidé à défendre mes droits face à la SAE, mais aussi en ce qui a trait à mes traitements en santé mentale. Cela m’a amené à siéger au premier d’une série de groupes consultatifs pour leur Bureau.

Au fil du temps, d’autres organismes et ministères gouvernementaux ont commencé à me remarquer. Les hauts dirigeants des ministères et des organismes auxquels j’étais client venaient me voir pour me demander conseil sur les changements probables à apporter aux politiques et aux pratiques.

J’ai toujours voulu être journaliste afin de pouvoir raconter les histoires des autres. Je n’aurais jamais imaginé que je partagerais la mienne un jour d’une manière très publique. Je passe beaucoup de temps à faire des discours, à offrir des conseils et des services de consultation. À l’occasion, je suscite même des débats quant à la position que ce pays adopte lorsqu’il s’agit du traitement des personnes atteintes de maladie mentale.


Voilà comment je passe de la sensibilisation à l’action!

Thursday, November 7, 2013

Face-à-face avec Marli Brown



Mes symptômes ont commencé très jeune; ils sont d’abord apparus sous forme d’anxiété. Lorsque j’étais toute petite, si quelqu’un que ne je connaissais pas venait à la maison, je me cachais sous la chaise de ma mère et je tombais endormie. J’ai perdu mes cheveux en commençant la maternelle, et lorsque j’étais en première année, j’ai eu des crises de panique qui ont entraîné l’hyperventilation, ce qui a causé des épisodes épileptiques et ce qui a eu comme conséquence beaucoup de trajets en ambulance. La première fois que je me rappelle avoir eu une pensée suicidaire était à l’âge de huit ans ‒ je croyais que le cerveau de tout le monde fonctionnait comme le mien; je m’inquiétais de ce qui se produirait si l’autobus scolaire se renversait et je me demandais comment je pourrais sortir? Je m’inquiétais au sujet de mon père lorsqu’il lavait les fenêtres doubles; je visualisais qu’il tombait et je me demandais ce que je pourrais faire pour l’aider. Je m’inquiétais de tout constamment, et je regardais les étoiles en espérant que quelqu’un ou quelque chose soulagerait ma douleur.

Lorsque j’étais au secondaire, j’ai eu recours à l’automutilation pour essayer de gérer mes émotions. Je consommais de l’alcool de façon excessive, je me frappais la tête contre les murs, je me coupais – tout cela en continuant de figurer au tableau d’honneur, en participant aux activités parascolaires et en planifiant mon éducation postsecondaire. J’ai travaillé très fort pour cacher le niveau de douleur psychologique qui était devenu « normal »pour moi, et j’étais à la poursuite de ma valeur dans la réalisation personnelle.

Au début de l’université, il s’est produit une série d’événements – j’étais une jeune femme qui allait vivre dans la grande ville après avoir reçu son diplôme du secondaire cinq, le début de l’université a été vite suivi d’une grève du personnel, il y a eu l’annonce que quelqu’un de la famille était atteint d’un cancer, et puis une perte massive dans un accident d’automobile. Au cours d’une très courte période, je suis restée confinée chez moi; j’étais convaincue que les autres pouvaient voir à quel point j’étais une personne horrible et je me suis mise à rêver, planifier et vivre chaque instant pour figurer une façon de mourir. Peu après, j’ai vécu mon premier épisode psychotique; une créature monstrueuse ressemblant à une fourmi se tenait derrière le fauteuil et me disait que j’allais mourir, car j’étais tellement horrible, tellement moins que rien et que mes proches allaient mourir avec moi. La seule manière de les sauver était de m’enlever la vie. Peu après, j’ai été hospitalisée pour la première fois dans un établissement psychiatrique.

J’ai lutté pendant plus de 10 années dans le système, avec des admissions répétées, beaucoup de médications différentes, des effets secondaires, des plans de traitement, et recueillant de nouveaux diagnostics psychiatriques chaque fois que différents médecins me traitaient tout au long de ce cheminement. J’ai continué à essayer de trouver qui j’étais, j’ai suivi des cours à l’université, j’ai occupé quatre emplois à temps partiel lorsque je pouvais travailler, et je me suis enfermée chez moi lorsque je ne pouvais pas. J’ai vraiment cru que si je travaillais encore plus fort, je pourrais retrouver une vie normale. Pourtant, peu importe les efforts que j’y mettais, rien ne fonctionnait.

J’avais certes de plus longues périodes de stabilité, mais je n’arrivais jamais à me débarrasser de ce sentiment interminable de dévalorisation absolue. J’ai adopté des stratégies d’adaptation afin de pouvoir fonctionner quand même, et je gérais ensuite la douleur derrière les portes closes. Mon époux et moi (que j’ai commencé à fréquenter à l’âge de 17 ans) avons eu à nous adapter aux changements au cours de notre relation – parfois il était celui qui devait me « surveiller » pour me maintenir en vie, et d’autres fois, nous étions des partenaires égaux dans la vie.

Une longue période de stabilité nous a amenés à réfléchir et après de nombreuses discussions, nous avons décidé de nous marier et d’avoir des enfants après 10 ans de fréquentation. Après avoir suivi un traitement de fertilité, j’ai donné naissance à notre premier enfant et j’ai fait une légère dépression post-partum. J’ai collaboré très étroitement avec mon gestionnaire de cas pour faire tout ce que je pouvais pour développer un sentiment d’attachement; tout allait bien au travail lorsque j’ai découvert les services sociaux et j’ai bien aimé faire du bénévolat communautaire (j’avais un don particulier pour la constitution et les règlements – j’étais une bolé de nature!). Quelques années ont passé et nous avons décidé d’essayer d’avoir un autre enfant.

Je suis tombée enceinte avec notre première fille, mais la grossesse a été très difficile dès le début. Nous avons découvert au milieu de ma grossesse qu’elle avait la triploïdie (qui est, selon la communauté médicale « non compatible avec la vie »). Elle est mort-née le 18 avril 2007. Ce fut de loin l’épreuve la plus difficile pour mon époux et moi-même. J’ai croyais avoir fait mon deuil après avoir pleuré un peu après sa naissance; j’étais loin de me douter de la douleur profonde qui m’attendait.

Je suis encore tombée enceinte peu de temps après, j’ai fait une fausse couche et puis je suis tombée de nouveau enceinte avec notre deuxième fille. Elle est née le 10 avril 2008. Huit jours plus tard, nous avons marqué le premier anniversaire de notre fille mort-née. Six semaines plus tard, j’ai subi le pire épisode de dépression post-partum qui a mené à une psychose peu de temps après. J’ai trouvé tout ce qu’il me fallait pour m’enlever la vie, j’ai même trouvé le lieu où j’allais le faire, il me restait seulement à trouver un endroit pour que ma fille soit en sécurité. Elle avait des coliques et elle ne cessait pas de pleurer, alors je ne pouvais pas la laisser. J’ai conduit pendant ce qui m’a semblé être des heures pour essayer de la calmer, mais elle n’arrêtait toujours pas et le destin a fait que je me suis rendue chez mon gestionnaire de cas pour me retrouver aux soins d’urgence.

J’ai été hospitalisée pendant 10 mois au cours de cette première année. J’ai essayé une thérapie électroconvulsive, différents traitements; tout me semblait mener nulle part. Je me suis sentie profondément démolie – un deuil non résolu, combiné avec une maladie mentale préexistante, en plus des problèmes de dépression post-partum, tout s’est accumulé au point où je devenais parfois catatonique; j’écrivais des codes sur les murs de ma chambre d’hôpital, et je voyais un homme vêtu d’un manteau noir me suivre dans les couloirs de l’hôpital. J’aurais pu vous donner le taux respiratoire du patient se trouvant à deux portes plus loin tellement mes sens étaient aigus.

La psychologue locale a été consultée – je l’avais vue sur l’étage avec son chien (il suivait une thérapie pour chien) et étant donné mon amour des animaux, elle m’a intriguée dès le début. En prenant le temps de faire connaissance, nous avons développé une confiance mutuelle. Elle m’a interrogée à mon sujet et non seulement sur des symptômes. Comme l’évaluation prenait fin et que les recommandations prenaient de plus en plus d’importance, nous nous sommes rencontrées régulièrement pour entreprendre une thérapie. En raison du haut niveau de confiance que j’ai établi, j’ai pu aller jusqu’au « cœur » de ma douleur et, pour la première fois de ma vie, j’ai été capable de commencer à traiter le traumatisme que j’ai éprouvé lorsque j’ai été victime d’abus sexuel alors que j’étais encore une jeune enfant. La douleur était intolérable et je devais souvent avoir un panier à ordure tout près, car les nausées étaient incontrôlables. Je me suis fâchée contre elle, et je sentais que je ne pourrais jamais y retourner, puis j’ai réalisé que ma colère n’avait rien à voir avec elle, mais qu’elle était causée par la douleur de la situation. Je savais que j’avais touché le fond – j’avais le choix d’y retourner pour faire face à la douleur et figurer un moyen de m’en sortir, ou bien de mourir. C’était à la fois compliqué et très simple.

J’ai été capable de parler de mon sentiment de culpabilité pour avoir perdu ma fille, de ma culpabilité de me sentir un être humain sans valeur et de la honte que je ressentais du plus profond de mon être pour avoir besoin de soins palliatifs psychiatriques. Lentement, très tellement, j’ai commencé à reprendre espoir en la vie. Les membres du personnel sur cette unité ont été merveilleux tout au long de cette année avec leurs hauts niveaux de collaboration et leurs idées non conventionnelles (j’ai reçu des laissez-passer de jour pour suivre des cours à l’université au beau milieu de cet épisode, puisque c’était une planche de salut pour moi) et ils ont été là pour moi lorsque mon époux amenait nos enfants me visiter chaque jour afin que nous puissions travailler à tisser les liens qui étaient nécessaires. J’ai pu obtenir mon diplôme d’études supérieures en travail social en 2011 et j’ai continué à contribuer à ma collectivité en faisant du bénévolat chaque fois que je le pouvais.

Au cours du lancement de cette campagne, on m’a demandé si j’étais guérie. Loin de là… Je manifeste toujours les symptômes d’une maladie mentale – notamment la dissociation, la psychose et les changements d’humeur quand les facteurs de stress deviennent trop accablants. La différence maintenant est que j’ai une équipe (en particulier une psychologue) à qui je fais confiance à 1 0000 %, et que j’ai travaillé très fort pour identifier les symptômes à mesure qu’ils surviennent afin que nous puissions les gérer immédiatement. J’ai cru fermement pendant plusieurs années que, si seulement je pouvais comprendre mes symptômes, je pourrais les faire disparaître. Je sais maintenant que de comprendre n’est pas suffisant pour que les symptômes disparaissent, mais que d’en être consciente me permet d’avoir accès au soutien beaucoup plus rapidement pour que la maladie dure moins longtemps. J’accepte le fait que mon cerveau fonctionne différemment des autres personnes et je suis particulièrement consciente lorsque je sens que les choses changent dans ma façon de penser ou de percevoir les choses. Je réalise que je peux accumuler ces changements en créant de mauvaises habitudes de pensées négatives et que je peux sombrer plus profondément dans la maladie, mais que le changement initial peut être relié à un changement au niveau du stress, au sommeil ou simplement à l’ennui. C’est mon rôle au sein de l’équipe de leur laisser savoir lorsque le changement initial apparaît afin que le traitement puisse faire effet et que la situation ne s’aggravera pas de façon exponentielle.


Très récemment, j’ai donné naissance à notre troisième fille. Mon risque de dépression post‑partum était très élevé. Je l’ai ressenti, mais grâce à la préparation et à l’intervention de mon équipe, il n’y a eu qu’une légère alerte. Pour la première fois, j’ai pu éprouver le sentiment maternel à l’égard de mon nouveau-né, immédiatement après sa naissance. Je suis tellement reconnaissante; les heures qu’ils ont consacrées à me donner des soins n’ont pas été faciles, mais l’idée du recouvrement, tel que je l’ai envisagé est maintenant bien présente dans ma vie. Le rétablissement pour moi n’est pas l’absence de symptômes, mais c’est plutôt de vivre une vie bien remplie tout en sachant comment les contrôler. Pendant plusieurs années, j’étais une morte ambulante, et je portais un masque en tentant de répondre aux attentes de la société. En enlevant ce masque et en invitant les membres d’une équipe à m’aider, je travaille tous les jours pour comprendre mon cerveau qui fonctionne différemment des autres. Est-ce que je crois que je suis formidable? Non, loin de là – en vérité, je crois qu’une partie de mon cerveau ne fonctionne tout simplement pas. Est-ce que je lutte contre ce sentiment pour accomplir des choses malgré tout? Oui – et pour cette raison, je suis infiniment reconnaissante.

Friday, October 25, 2013

Face-à-face avec Bernard Saulnier



Aider, voilà  ce que veux dire pour moi l'action en santé mentale, l'action contribue à mon rétablissement. Je prend conscience des choses que j'ai a améliorer. J'espère grandir dans cette démarche aller vers le mieux du rétablissement et témoigner que c'est possible. Le chemin est parfois long et sinueux avec des hauts et des bas mais pour moi c'est important de persévérer. Je veux aussi que les gens prennent conscience que tout près d'eux souvent y'a des gens qui souffrent. J'espère faire disparaître les stigmates attachés à la maladie mentale. Passer de la sensibilisation à l'action contribue à mon rétablissement, l'action c'est l'empowerment, le pouvoir sur ma vie, oui j'ai une maladie mentale mais c'est le départ de la grande aventure du rétablissement, l'action citoyenne, les droits et les devoirs. Faire de mon mieux contribue à cette prise de pouvoir. L'action c'est important on dis parfois que s'occuper ça empêche de se préoccuper. L'action, l'échange entre pairs c'est une prise de conscience que se rétablir c'est possible. Tendre la main voilà je crois ce qu'il faut faire. Se tourner vers l'autre en laissant tomber son désir à soi. L'aventure du rétablissement pour moi c'est aussi faire les bons choix dans toutes les dimensions de ma vie. Développer une vie spirituelle voilà aussi une chose importante pour le rétablissement, essayer de prendre conscience qu'il y a quelque chose de plus grand qui peux m'aider. Le rétablissement me permet aussi de voir ou sont mes forces et mes faiblesses, d'accepter aussi.


Tout ça c'est une grande aventure ou j'espère récolter un peu de sérénité et d'humilité. Je veux essayer d'être honnête, un citoyen honnête voilà ce qui compte. Ça fait vingt ans que je me rétablis et la vie m'amène toujours de belles surprises. Je souffre encore mais cette souffrance n'est plus la même j'essais de grandir avec elle d'en faire une leçon de vie. C'est aussi d'en parler de la santé mentale de ne pas avoir peur de demander de l'aide pour avoir des yeux clairs plutôt que rougis par les larmes de la douleur. Le rétablissement c'est un beau voyage j'ai essayé d'y croire. J'en récolte les fruits et vous remercie d'en faire partie.